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l'abécédaire des mots d'antan - R -

Envoyée dimanche 04 mars 2012 à 00:00:00

Samuel Campfort et Élise Lancien-Isnard 

 

dans le cadre des dimanches de Singulières Écritures

 

vous proposent : L'abécédaire des mots d'antan

 

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R comme roger-bontemps - nom masculin



 

Ce nom vous dit quelque chose ? Oui, vous avez raison l’affaire Bontemps-Buffet qui défraya la chronique judiciaire dans les années 70.  Assassins à la centrale de Clervaux d’un gardien et d’une infirmière, Bontemps sera guillotiné.



 

Mais ce n’est pas de ce Roger Bontemps dont il s’agit ici mais d’un autre Roger Bontemps, surnom de Roger de Colleyre (1470-1536). Ce dernier était prêtre et secrétaire de l’évêque d’Auxerre. Né à Paris,  il était de l'humeur la plus joviale et présidait à Auxerre une société facétieuse dont le chef prenait le titre d'abbé des fous. Il a laissé quelques écrits en prose et en vers, qui ont été réunis pour la première fois en 1536 et réimprimés en 1856 par Charles d’Héricault.

C'est d'après lui qu'on a nommé depuis roger-bontemps un homme qui est sans souci, une personne de belle humeur. 


 

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Aux gens atrabilaires
Pour exemple donné,
En un temps de misères
Roger Bontemps est né.
Vivre obscur à sa guise,
Narguer les mécontents ;
Eh gai ! c’est la devise
Du gros Roger Bontemps.

Du chapeau de son père,
Coiffé dans les grands jours,
De roses ou de lierre
Le rajeunir toujours ;
Mettre un manteau de bure,
Vieil ami de vingt ans ;
Eh gai ! c’est la parure
Du gros Roger Bontemps.

Posséder dans sa hutte
Une table, un vieux lit,
Des cartes, une flûte,
Un broc que Dieu remplit,
Un portrait de maîtresse,
Un coffre et rien dedans ;
Eh gai ! c’est la richesse
Du gros Roger Bontemps.

Aux enfants de la ville
Montrer de petits jeux ;
être un faiseur habile
De contes graveleux ;
Ne parler que de danse
Et d’almanachs chantants ;
Eh gai ! c’est la science
Du gros Roger Bontemps.

Faute de vin d’élite,
Sabler ceux du canton ;
Préférer Marguerite
Aux dames du grand ton ;
De joie et de tendresse
Remplir tous ses instants ;
Eh gai ! c’est la sagesse
Du gros Roger Bontemps.

Dire au ciel : Je me fie,
Mon père, à ta bonté ;
De ma philosophie
Pardonne la gaieté ;
Que ma saison dernière
Soit encore un printemps ;
Eh gai ! c’est la prière
Du gros Roger Bontemps.

Vous, pauvres pleins d’envie,
Vous, riches désireux,
Vous, dont le char dévie
Après un cours heureux ;
Vous, qui perdrez peut-être
Des titres éclatants,
Eh gai ! prenez pour maître
Le gros Roger Bontemps.

 

poème de Pierre-Jean de Béranger (1780–†1857)

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